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Reclus de Monflanquin: Tilly écope de huit ans de prison pour son « complot machiavélique »

Reclus de Monflanquin: Tilly écope de huit ans de prison pour son « complot machiavélique »

Publié le : 13/11/2012 13 novembre nov. 11 2012

BORDEAUX (Sipa) — Le tribunal correctionnel de Bordeaux a condamné mardi Thierry Tilly à huit ans de prison ferme dans l’affaire dite des reclus de Monflanquin, une famille d’aristocrates bordelais qu’il a ruinée en lui faisant croire qu’elle était la cible d’un complot.

Thierry Tilly, 48 ans, a été jugé coupable des délits de détention arbitraire, de violences sur personnes vulnérables et d’abus de faiblesse sur personnes en état de sujétion psychologique. Son maintien en détention ordonnée, il a également été condamné à une peine de cinq ans de privation des droits civiques et civils. Son complice Jacques Gonzalez, convaincu du recel des biens dérobés par Tilly, a écopé de quatre ans d’emprisonnement.

« Ca ne fait que commencer », a aussitôt réagi celui qui a été surnommé de gourou de la famille Védrines, affirmant qu’il bénéficiait de l’habeas corpus en tant que « citoyen anglais », et évoquant sa volonté d’aller devant la Cour européenne de justice. Interrogé par Sipa, son avocat Alexandre Novions ignorait encore toutefois s’il allait faire appel.

La peine maximale, soit dix ans de prison, avait été requise le 4 octobre contre M. Tilly. Le tribunal n’a pas complètement suivi le procureur, le relaxant pour les faits datés de 1999 à 2001, c’est à dire avant le vote de la loi reconnaissant le délit d’abus de faiblesse sur personne en état de sujétion psychologique. Il a toutefois reconnu le préjudice moral pour les Védrines, assorti de fortes indemnisations, notamment 80.000 euros pour Christine de Védrines.

Victime de violences de la part de Thierry Tilly et du reste de la famille, c’est elle qui a porté plainte et provoqué l’arrestation du gourou en 2009. « Je remercie la justice bordelaise, qui a toujours pris en compte cette catastrophe familiale », a-t-elle déclaré à la sortie de l’audience. « Huit ans, c’est peu cher payé pour tout ce qu’il a fait à notre famille et nos enfants, mais le procès est derrière nous et on va tout faire pour se reconstruire », a-t-elle ajouté.

Philippe, 74 ans, l’aîné des enfants (leur mère est décédée en 2010), a espéré qu’avec cette peine inférieure au maximum encouru, Thierry Tilly n’irait pas en appel. « Je mourrai avec cette histoire dans la tête », a-t-il dit.

De 2001 à 2009, la famille Védrines, membre de la haute société protestante du Sud-Ouest, a vécu cloîtrée dans le château Martel, à Monflanquin (Lot-et-Garonne), puis à Oxford (Angleterre). Soit disant pour la protéger, Thierry Tilly l’a dépouillée de tous ses biens, d’une valeur de 4,5 millions d’euros.

Comment a-t-il échafaudé ce « complot machiavélique », selon les mots de la présidente du tribunal, et berné des gens sains d’esprit tenant le haut du pavé ? Embauché en 1999 par Ghislaine de Védrines, directrice d’une école de secrétariat à Paris, Tilly s’était ensuite rapproché du reste de la famille. Dans les motivations de son jugement, le tribunal correctionnel détaille les ressorts de la « sujétion psychologique » de ses 11 membres: « Au début, Thierry Tilly a inspiré confiance puis séduit ses interlocuteurs par la démonstration de ses qualités d’homme, capable de faire face à toutes les situations et de résoudre toutes les questions », financières ou d’orientation scolaire des enfants.

Cet ancien membre d’une loge maçonnique « tenait alors un discours récurrent sur l’existence d’un complot de « ceux qui leur en veulent » étendu aux francs-maçons, les rose-croix, les homosexuels et les juifs. Mais leur famille avait eu la chance d’avoir été retenue parmi les « élus », « choisis » en raison de leur appartenance à ces familles de nobles, d’origine terrienne et protestants ».

Thierry Tilly, « agent secret, en lien avec des organisations supranationales », leur a fait croire qu’il les protégeait, grâce à une surveillance vidéo et satellite… Qu’il fallait bien évidemment que les Védrines financent.

Après avoir éliminé les gêneurs en retournant les Védrines contre leur environnement proche, Tilly a pratiqué selon le tribunal la « déstabilisation mentale », distillant des propos dénigrants et jouant sur les rivalités et mesquineries entre membres de la famille, fâchant des couples et des parents avec les enfants. Et il est allé jusqu’aux « atteintes à l’intégrité physique », enfermant Christine plusieurs jours dans un pièce obscure, sous-alimentant ou privant de soins d’autres personnes.

Le tribunal correctionnel a considéré que les conséquences – patrimoniales, sanitaires, affectives- étaient  » gravement préjudiciables ».

Il a pourtant fallu attendre 2008 et les premières réactions des victimes pour que cette emprise mentale puisse cesser. A la grande satisfaction Me Daniel Picotin, avocat des parties civiles, qui estime que le jugement « fera date ». Président d’Info Sectes Aquitaine, il rappelle toutefois que le droit ne permet pas pour l’instant de « prévenir ce fléau social » qu’est le « hold-up du cerveau ». Il appelle donc à un renforcement de la législation afin d’autoriser les proches de victimes à saisir la justice.

Source : Le Nouvel Observateur du 13/11/12

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