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Christine de Védrines, ex-recluse à Monflanquin, tire les leçons de « la catastrophe »

Christine de Védrines, ex-recluse à Monflanquin, tire les leçons de « la catastrophe »

Publié le : 01/12/2012 01 décembre déc. 12 2012

Enfance heureuse, mari et enfants aimés, aisance financière… Christine de Védrines avait tout, avant d’être manipulée avec les autres membres de sa famille, devenus les « reclus de Monflanquin ». Une « catastrophe » dont elle a tiré un livre, et après laquelle elle tente d’aider d’autres victimes, grâce à « l’exit counseling ».

Thierry Tilly, un « génie » dans son genre, reconnaît-elle amèrement, a siphonné en dix ans les biens de onze membres de cette famille d’aristocrates parfaitement intégrée. Du huis clos dont il tirait les ficelles, souvent à   distance, Christine, la plus malmenée, garde les séquelles d’une séquestration d’une dizaine de jours en Angleterre, sans presque manger ni dormir.

En mars 2009, elle parvient à s’enfuir, porte plainte. Tilly est arrêté en octobre, les autres sont libérés en décembre de l’emprise qu’il exerce toujours sur eux. Il a été condamné le 4 juin par la cour d’appel de Bordeaux à dix ans de prison, le maximum encouru.

« Il m’a transformée en sous-homme, mais j’ai retrouvé l’estime de moi en réussissant à me sauver, à le faire arrêter, à faire libérer ma famille », explique Christine. Elle vient de publier le récit limpide de cette aventure, « Nous n’étions pas armés » (Plon), avec en postface le témoignage de son mari Charles-Henri et de leurs trois enfants.

Cette femme, qu’on devine de nature joyeuse, y décrit une enfance « heureuse, aimante », quoique « solitaire », dans une famille aisée, son mariage avec Charles-Henri, qui avait « les mêmes codes » qu’elle. Puis l’irruption dans ce bonheur douillet du « chaos », de « l’enfer », et les Védrines transformés en « +fadas+ du coin ».

Elle n’a jamais aimé Tilly, mais, « docile », n’a pas su s’opposer. Une « intelligence en jachère », résume-t-elle, que Tilly réveille en commettant l’erreur de calomnier ses enfants: « Mon livre est un message d’espoir: il peut toujours y avoir un ressort pour une victime d’emprise… Moi, c’est l’instinct maternel. »

Désormais, elle veut « aider à faire comprendre ce que sont la manipulation et l’emprise ».

« Adapter la clé à la serrure »

Séances de dédicaces, émissions télévisées, rencontres avec d’autres victimes… Elle a aussi témoigné, avec son avocat, Me Daniel Picotin, spécialiste de l’emprise mentale, devant la commission d’enquête du Sénat sur les dérives sectaires et thérapeutiques, qui a rendu son rapport en avril.

Elle se fait « ambassadrice » de « l’exit counseling », méthode de sortie d’emprise créée par l’Américain Steven Hassan, qu’elle a pu rencontrer à Bordeaux à la fin juin, et adaptée par Me Picotin.

Outré à l’époque de son « deprogramming », un vigoureux lavage de cerveau organisé par sa famille pour le sortir de la secte Moon, M. Hassan préconise des moyens reposant sur le consentement de la personne. Il a aidé à tirer des sectes un millier de personnes en trente ans.

Pour ne pas donner de recettes aux manipulateurs, Me Picotin -et le livre- restent discrets sur la « French touch » apportée à la méthode Hassan.

Toujours est-il qu’il n’a fallu que quelques heures à son équipe de psychothérapeutes pour libérer, en douceur, le reste de la famille Védrines, à Oxford, fin 2009. Car ils s’étaient fait décrire auparavant les victimes pendant des mois: « Afin, selon la psychologie de chacun, d’adapter +la bonne clé à la bonne serrure+ », explique Christine.

Décidée à « faire de cette catastrophe une force », elle souhaite désormais, comme son avocat, que la loi permette aux proches des victimes de porter plainte pour emprise mentale, voire de faire mettre la victime sous tutelle, pour éviter l’évaporation de ses biens.

Cette dernière mesure, pense-t-elle, lui aurait évité la crainte d’être un jour, avec son mari, à la charge de leurs enfants.

A 62 ans, elle enseigne dans une école d’insertion près de Bordeaux. Charles-Henri, gynécologue-obstétricien renommé, qui avait dévissé sa plaque en pleine nuit pour vivre en reclus, va reprendre un cabinet à Saint-Aubin du Médoc. Contraint à entamer une nouvelle carrière, à 65 ans.

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